« Premières impressions – Flânerie »
Boire et manger
La bouffe, la bière – au comptoir des écrivains décédés – luxe et fast food
Parlons bouffe un instant. C’est l’un des plaisirs du voyage ainsi qu’une manière de comprendre un peu mieux les cultures que l’on rencontre. Les cyniques diront que, dans cette optique, j’aurais dû m’en tenir au fast food pour manger comme les Américains. En voyage, je manie le cynisme comme la caméra: je ne le sors que quand ça en vaut vraiment la peine.
La chance m’ayant souri, la terrasse où je me trouve est celle du Parish Cafe and Bar, sur Boylston. Une multitude de certificats et d’articles de journaux à l’entrée proclament l’endroit comme le paradis du sandwich. Le menu offre une bonne douzaine de spécialités conçues par des chefs de divers restaurants locaux. Je me fais servir le Zuni Roll: dinde fumée, bacon, échalotes et havarti à l’aneth dans une tortilla avec chipotle aux canneberges. Savoureux. Et pour accompagner le tout…
Parlons bière un instant. C’est l’un des plaisirs du voyage ainsi qu’une manière de comprendre un peu mieux les cultures que l’on rencontre. Et, oui, il y a de la bonne bière aux États-Unis. Au Québec, nous ne recevons que la mauvaise; il y a pourtant d’excellentes microbrasseries américaines. Il se fait de l’excellente musique au Canada; aux États-Unis, ils n’entendent à peu près que Céline Dion. Maudites frontières.
C’est donc une Humble Patience de chez Magic Hat qui accompagne mon repas. Ça ne fait que commencer. Le lendemain soir, je découvre le Bukowski, une taverne que la Providence a placée à trois minutes de marche de mon auberge. C’est un truc étroit mais profond, rien de rutilant nulle part, un lieu obscur où joue de la musique obscure. Une multitude de grands bocs pendent au-dessus du bar, gros fruits murs, chacun marqué du nom d’un auteur décédé. Ils ne sont pas donnés à tout le monde. L’endroit offre un impressionnant menu de bières (une centaine de variétés environ) et seul l’acharné qui les boit toutes a le droit de se faire graver un boc au nom de son auteur favori. Il peut ensuite boire le boc au prix de la pinte. Ah, si j’avais le temps…
Au Bukowski, soir après soir, j’essaie une variété d’India pale ales, quelques porters et stouts, toutes des bières américaines qu’on ne trouve pas au Québec. Les gens derrière le bar me prodiguent de bons conseils. La Victory Hop Devil est bien, mais c’est la Dogfish Head 90 Minute IPA qui s’avère la plus marquante: une bière très houblonnée à 9% d’alcool qui assaille les papilles d’une manière fort agréable. Dès la première soirée, l’une des serveuses daigne avoir une vraie conversation avec moi, ce qui lui attire mon infinie gratitude. Elle est jolie, en plus. Heureusement, mon séjour se terminera avant que je puisse l’embarrasser par quelque déclaration d’amour enivrée.
Revenons à la bouffe un peu. C’est au Sonsie sur Newbury, juste avant ma découverte du Bukowski, que je mange mon repas le plus dispendieux du voyage. L’endroit est un peu huppé à mon goût, muni d’une section salle à dîner et d’une section plus informelle devant la fenêtre, pour voir et être vu. On m’y accueille pourtant bien, malgré mon manque de classe évident. En ce genre d’endroit, la description des mets constitue un plaisir en soi. Je me laisse donc tenter par une entrée de gravlaks de saumon (mariné au bourbon et à la cassonade) avec salade de patates douces, pacanes rôties au Tabasco et crème fraîche au Jack Daniels, suivie d’une pizza aux champignons qui coûte moins cher que l’entrée. Une coupe de blanc avec ça et me voilà comblé.
Ceci dit… parlons quand même du fast food. Ça reste essentiel à la survie de l’écrivain pauvre et défavorisé par le taux de change. À quelques reprises, je me hasarde donc dans les food courts pour des mets plus rapides que sains et pour d’occasionnelles doses de Mountain Dew. C’est un breuvage que j’affectionne pour sa belle couleur chimique qui réveille mes instincts de savant fou, et la version américaine contient plus de caféine que le Pepsi. Une chose à retenir: les portions sont grosses de ce côté-ci de la frontière (les clichés sont vrais: think big!). Un café « standard » ressemble à un grand format de chez nous, les épiceries vendent des bouteilles de trois litres et le thé glacé commandé au comptoir d’une place à sandwiches d’apparence innocente m’est servi sans préavis dans un format obélixien.